Dom Guéranger et Jenny Bruyère : à l’origine de l’abbaye Sainte-Cécile
Ayant été malade au moment de la cérémonie de première communion dans sa paroisse parisienne, une enfant de onze ans, Jenny Bruyère, la fait à Sablé le 28 mai 1857. Dom Guéranger avait accepté de l’aider à s’y préparer. L’Abbé de Solesmes continue par la suite à accompagner Jenny qui prend le nom de Cécile lors de sa confirmation. Puis, un jour, Cécile confie à son Père spirituel que depuis sa petite enfance elle entendait en son cœur un appel de Dieu à lui appartenir. Connaissant sa maturité précoce, le Père abbé lui permet, après un an de probation, d’émettre le vœu de virginité le jour de ses seize ans, le 12 octobre 1861. Mais ce vœu vécu en plein monde ne comble pas encore le désir de Cécile. En lisant les œuvres de sainte Gertrude, elle comprend que c’est à la vie bénédictine qu’elle aspire. Dom Guéranger est cependant loin d’envisager une fondation féminine et il résiste longtemps aux instances qui lui sont faites d’entreprendre une fondation pour des moniales.
Signe de la Providence, c’est alors que des jeunes filles de la région de Sablé, dont certaines étaient connues de Cécile, révèlent qu'elles ressentent le même attrait pour la vie bénédictine. D’autres, de Marseille, vivant déjà des vœux privés dans le monde, s’ouvrent à Dom Guéranger de leur profond désir d’une vie monastique centrée sur la liturgie. Enfin, en 1862, Monseigneur Fillion, évêque de Saint-Claude, mais issu du clergé manceau, est promu au siège épiscopal de son diocèse d’origine. Un tel évêque, ami de longue date du père abbé, loin de soulever des difficultés, serait un appui exceptionnel pour une fondation monastique.
Cependant, pour écarter définitivement un projet qu’il redoutait, Dom Guéranger a l’idée de consulter son prieur, moine exemplaire et prudent à l’excès, qui connait mieux que d’autres ce qui pèse déjà sur les épaules de son abbé. Or, au grand étonnement de ce dernier, Dom Couturier lui répond avec assurance que ce serait là peut-être la consolation de ses vieux jours... Désormais, Dom Guéranger n’hésite plus, il va de l’avant malgré les oppositions ou les obstacles qui signent toujours, à leur manière, les œuvres de Dieu. Au mois d’octobre 1866, ayant compris que l’œuvre est vraiment voulue de Dieu, il se donne tout entier à sa nouvelle tâche.